Augures [suite]
C'étaient donc d'heureux présages : j'entre dans la carrière au moment même où l'un de mes aînés n'y est plus. Le pot de départ de mon père était très émouvant, comme l'était l'apéritif informel organisé avec deux de mes amies autour d'une bouteille de Pétillant de Listel et lors duquel on m'offre mon premier journal de classe. Je ne sais pas si je serai une bonne enseignante, mais quand j'entends les gens parler de mon père et du bonheur avec lequel il a toujours fait cours, je me rassure en me disant que j'ai de qui tenir. Et puis qui sait ? Si j'ai pu hériter ne serait-ce que d'un dixième de sa passion alors c'est déjà bien. A l'entendre parler de ses anciens élèves et du plaisir qu'il a pris tout au long de sa carrière, je me dis qu'il n'y a aucun hasard à ce que nous nous retrouvions où nous sommes aujourd'hui, Marie et moi. Et quand je vois toutes ces personnes se succéder autour du micro pour y aller de son petit discours alors je me sens fière, fière d'avoir un père qui a marqué tant d'élèves et de collègues, fière que l'on reprenne ce flambeau si précieux, et fière qu'il en soit fier.